top of page

Recyclage : la France risque de ne pas remplir ses objectifs à horizon 2025

La transformation des déchets en ressources est une composante essentielle de l’économie circulaire. Si des efforts indéniables sont réalisés par les Etats membres, un rapport publié aujourd’hui par la Commission européenne, d’après l’évaluation réalisée par l’Agence européenne pour l’environnement¹, alerte : la majorité des Etats membres risquent de ne pas atteindre les objectifs de préparation en vue du réemploi et de recyclage des déchets municipaux fixés pour 2025 et la France ne fait pas exception.



© Stockgiu-freepik


L’amélioration des performances en matière de gestion des déchets accélérera la transition vers une économie circulaire et contribuera à la réalisation des objectifs du plan d’action en faveur d’une Europe plus propre et plus compétitive² visant à doubler le taux d’utilisation circulaire des matériaux dans l’UE, à réduire considérablement la production totale de déchets et à réduire de moitié la quantité de déchets municipaux résiduels d’ici à 2030. Assurer une gestion écologiquement rationnelle des déchets est essentielle pour prévenir les incidences négatives sur l’environnement et sur la santé de la production de déchets et atteindre les objectifs du plan d’action « zéro pollution »³ relatifs aux déchets et aux déchets marins. « Cela implique de renforcer la préparation en vue du réemploi et le recyclage ainsi que de réduire la mise en décharge pour parvenir à la neutralité climatique, améliorer la sécurité de l’approvisionnement en matières premières, économiser l’énergie et réduire la dépendance de l’UE à l’égard des importations en provenance de pays tiers, tout en créant des emplois à l’échelon local et en stimulant l’innovation dans les nouvelles technologies en matière de produits durables et de gestion des matières. » souligne le rapport.


Plusieurs objectifs à horizon 2025


Les Etats membres doivent prendre des mesures pour atteindre au minimum :

  • un taux de 55 % de préparation en vue du réemploi et de recyclage de déchets ménagers d’ici 2025 ;

  • un taux de 65 % de recyclage de tous les déchets d’emballages d’ici 2025 et

  • des objectifs de recyclage spécifiques par matière pour les déchets d’emballages de 75 % pour le papier et le carton, 70 % pour le verre, 50 % pour l’aluminium, 50 % pour le plastique et 25 % pour le bois. Le plastique étant le matériau le plus critique.

Si sur 27, 9 Etats membres sont sur la bonne voie pour atteindre ces deux objectifs : l’Autriche, la Belgique, la République tchèque, le Danemark, l’Allemagne, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Slovénie ; en revanche 8 risquent de ne pas atteindre l’objectif relatif aux déchets municipaux : l’Estonie, la Finlande, la France, l’Irlande, la Lettonie, le Portugal, l’Espagne et la Suède ; et 10 Etats membres risquent de ne pas atteindre les objectifs à la fois relatifs aux déchets municipaux et à tous les déchets d’emballage en 2025 : la Bulgarie, la Croatie, Chypre, la Grèce, la Hongrie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la Roumanie et la Slovaquie.


Pour rappel, en 2020, les Européens ont produit en moyenne 521 kg de déchets municipaux par personne, dont 49 % ont été préparés en vue du réemploi ou recyclés, tandis que près de 23 % ont été mis en décharge.⁴ Le volume de déchets générés a lentement augmenté ces dernières années. La directive prévoit également des objectifs ambitieux à plus long terme : 60 % d’ici 2030 et 65 % d’ici à 2035⁵, ainsi que d’autres exigences telles que la mise en œuvre de la collecte séparée des déchets et l’adoption de plans nationaux de gestion des déchets et de programmes de prévention des déchets.


Le cas de la France


La France risque donc de ne pas atteindre l’objectif de 55 % fixé pour 2025 en ce qui concerne la préparation en vue du réemploi et le recyclage de ses déchets municipaux mais l’Hexagone est sur la bonne voie pour atteindre l’objectif de recyclage de 65 % de l’ensemble des déchets d’emballages d’ici à 2025. Toutefois, le pays risque de ne pas atteindre l’objectif de 50 % d’ici 2025 qui s’applique spécifiquement aux emballages en plastique.


En France, le taux de recyclage des déchets municipaux a régulièrement augmenté, passant de 42,9 % en 2016 à 45,1 % en 2018, mais il a diminué depuis. En 2020, il s’élevait à 42,7 %. Le taux de mise en décharge est passé de 22,4 % en 2016 à 18,1 % en 2020, se rapprochant ainsi de l’objectif fixé pour 2035. La France présente un taux d’incinération des déchets municipaux relativement élevé : 38,1 % en 2020, un chiffre supérieur à la moyenne de l’UE de 27 %.


La France présente déjà des taux de recyclage des déchets d’emballages supérieurs aux objectifs de recyclage (65,6 % en 2019 par rapport à l’objectif de 65 %) ; elle a également atteint les objectifs pour la plupart des types de déchets d’emballages (papier et carton, métal, bois et verre). Cependant, le taux de recyclage des déchets d’emballages en plastique est loin de l’objectif de 50 % (26,9 % en 2019). Parmi les principales difficultés auxquelles le pays se heurte figurent la collecte et le traitement des biodéchets municipaux qui restent insuffisants. La collecte séparée des biodéchets n’est pas courante en France. Seule une petite partie de la population est couverte par un système de collecte séparée. Les biodéchets sont pourtant le flux de déchets le plus important pour lequel des mesures sont donc nécessaires : ils constituent en moyenne 34 % des déchets municipaux. « Il convient de privilégier la mise en place ou l’extension de capacités efficaces pour la collecte séparée et le traitement des biodéchets. Une gestion écologiquement rationnelle des biodéchets pourrait permettre de les utiliser comme engrais et comme amendement pour sols, ainsi que pour la production de biogaz. Elle peut contribuer de manière significative à la réalisation des objectifs climatiques et aider à atteindre les objectifs de l’UE en matière de sécurité de l’approvisionnement en énergie et en matières premières critiques en remplaçant les engrais minéraux obtenus par extraction tout en améliorant la santé des sols. » souligne le rapport. Le captage des emballages en plastique dans les systèmes de collecte séparée est lui aussi insuffisant. L’introduction de systèmes de consigne pour les emballages en plastique peut augmenter ces taux de captage. Les régimes de responsabilité élargie des producteurs ne couvrent pas les déchets d’emballages en plastique commerciaux. Si la France a introduit de nombreuses mesures nouvelles qui devraient permettre d’améliorer les résultats dans les années à venir, « il convient d'intensifier considérablement les efforts pour que tous les objectifs fixés pour 2025 soient atteints. » soutient le rapport, tant le processus est long. Pour améliorer ses performances en matière de gestion des déchets, la France est invitée à « soutenir la préparation en vue du réemploi des déchets municipaux et les systèmes de réemploi des emballages ; améliorer le tri et la collecte des biodéchets à la source et veiller à ce que les capacités consacrées à leur traitement soient suffisantes ; à mettre en œuvre un système de paiement aux déchets qui couvre l’ensemble de la population et incite davantage le public à trier les déchets à la source et à améliorer et étendre les systèmes de collecte séparée, en particulier pour les déchets plastiques, et garantir que tous les types de déchets d’emballages en plastique sont collectés. »

Des progrès notables sont possibles si les actions axées sur les biodéchets et les déchets d’emballages sont mises en oeuvre : « améliorer la qualité des données, assurer une mise en œuvre efficace des règles, et mettre en place des instruments économiques renforcés (tels que des régimes efficaces de responsabilité élargie des producteurs et des taxes adaptées sur la mise en décharge et l’incinération) sont des mesures essentielles pour récolter tous les bénéfices de l’économie circulaire et se conformer à la législation de l’UE en matière de déchets. » soutient le rapport.


Si aucune sanction n’est à l’ordre du jour en cas de non atteinte des objectifs, l’accès à certains financements européens pourraient toutefois devenir plus complexes. La sanction naturelle d’une planète en détresse pourrait être bien plus violente. « Si on ne fait rien, en 2060, il y aura plus de plastique que de poissons dans les océans » déclarait Christophe Béchu il y a quelques jours… La France va devoir aller plus loin qu’interdire la vaisselle jetable dans la restauration rapide et plus vite.



¹https://www.eea.europa.eu/publications/many-eu-member-states-are

² COM(2020) 98 final.

³ COM(2021) 400 final.

⁴ Eurostat

⁵ Article 11, paragraphe 2, points c) à e), de la directive 2008/98/CE.

Comments


bottom of page