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Agir pour résorber les inégalités de genre

Cinquième objectif de développement durable de l’ONU « Réaliser l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles », la lutte contre les inégalités de genre fait l’objet d’initiatives et projets à l’échelle internationale. Pourtant, la facture des inégalités de genre représentait encore en 2022 entre 102 et 118 millions d’euros pour la France.¹ Au-delà des conséquences physique et psychologique notamment pour les femmes, leurs premières victimes, le sexisme et les discriminations de genre pèsent sur l’ensemble du corps social. Un constat qui appelle à s’atteler collectivement à les faire reculer, mais qui rappelle aussi que le chemin est encore long malgré une mobilisation croissante.



Des chiffres alarmants


En 2022, la Fondation des Femmes estimait que les violences au sein du couple et leurs incidences auraient couté à la société 3,6 milliards d’euros. Ce, tant en coûts directs (soins médicaux, accueil et accompagnement des victimes et des auteurs, action des forces de l’ordre, de l’administration judiciaire et pénitentiaire…) qu’indirects (pertes de rémunération, absentéisme, recours aux aides sociales…). Sans compter pour les victimes la douleur et ses préjudices, inestimables. La Fondation évaluait le coût des « comportements virils » à 89,3 milliards d’euros, pour l’Etat (intervention des force de police, de justice et de santé…), mais aussi pour la société (souffrances psychologiques et physiques, pertes de productivité, destructions de biens). L’impact social et sociétal des inégalités au sein du système de santé s’élèverait lui à 3,6 milliards d’euros. Quant au coût des inégalités professionnelles (écart salarial, taux d’activité, travail partiel, proportion de cadres…), il est estimé entre 5 et 22,5 milliards d’euros pour la France en 2022. Ailleurs, le FMI estimait que les pays en développement augmenteraient leur PIB de 8 % en réduisant les inégalités de genre sur le marché du travail. Un chiffre qui atteindrait les 23 % si elles étaient éradiquées.²


Un défi collectif


La prise de conscience de l’impact des inégalités de genre sur la société dans son ensemble, hommes compris, est toutefois encore bien insuffisante pour faire reculer le phénomène. Fortement ancrées, structurelles, lutter contre ces discriminations aux multiples ramifications nécessite d’ouvrir plusieurs fronts simultanés. Les inégalités professionnelles par exemple « commencent très tôt avec le choix d’études des filles. Très peu vont vers les STIM (science, technologie, ingénierie et mathématiques). Il y a donc trop peu de femmes ingénieures, économistes… qui sont des métiers où on gagne mieux sa vie » regrette l’économiste Emmanuelle Auriol.³ De fait, les femmes sont ainsi encore (très) majoritaires dans les emplois précaires et/ou mal rémunérés (éducation, santé, travail social, aide à la personne, nettoyage…). En France, elles représentent environ 95% des assistants maternels, employés de maison et aides à domicile.⁴ « L’écart salarial plafonne aujourd’hui, notamment en raison de la « child penalty » qui conduisent les femmes à faire des choix de carrières qui les pénalisent sur le plan économique. » précise l’économiste. Sur le long terme, leurs carrières sont hachées et les pensions de retraites moindres. C’est donc tout un système qu’il faudra déconstruire pour espérer réduire les inégalités de genre, professionnelles mais pas seulement. Un travail de longue haleine qui devra impliquer l’ensemble des parties prenantes, qu’il s’agisse des administrations, du secteur privé, mais aussi associatif et de la recherche. Autant d’acteurs concernés par le mouvement « #Ecouteznousbien » lancé par la Fondation de France à l’aube des élections présidentielles de 2022. Ses initiateurs ont rédigé une pétition demandant aux candidats d’intégrer à leur programme un plan d’urgence comprenant a minima un budget d’un milliard d’euros pour lutter contre les violences conjugales et 10 mesures visant à mettre fin aux multiples inégalités (éducation, santé, émancipation économique, égalité salariale…). Cela a t-il été suivi des faits ?


Des progrès réels mais timides


Les lignes commencent à bouger. Dans de nombreux pays, le cadre réglementaire se durcit par exemple pour forcer la main des entreprises qui ne jouent pas le jeu de l’égalité professionnelle. En France, la loi Copé-Zimmermann sur l’égalité professionnelle adoptée en 2011 obligeait les entreprises cotées à inclure au moins 40% de femmes dans leurs conseils d’administration (CA). Une proportion qui a atteint 46,7 aujourd’hui dans les CA du CAC40 !⁵ Elles seraient 33% dans les comités exécutifs et la loi Rixain prévoit de porter ce chiffre à 40% d’ici 2030. La Commission européenne a elle adopté en 2022, la directive dite « Women on Boards » qui s’imposera à toute entreprise de plus de 250 employés : 40% des postes d’administrateurs non exécutifs devront être occupés par le sexe sous-représenté, sous peine de sanctions. Autre signe de progrès : la Banque mondiale relève, elle, une part croissante de femmes « propriétaires uniques » d’entreprises dans 45 pays, sur les 71 couverts.⁶


Ces avancées, encourageantes, ne doivent pas occulter le chemin qu’il reste à parcourir. En France, les résultats de l’index d’égalité femmes-hommes, rendus obligatoires pour toute entreprise de plus de 50 salariés par la loi du 5 septembre 2018, sont sans appel. Il y a certes certains progrès : une note moyenne en hausse (88 contre 84 en 2020), une augmentation des entreprises ayant publié leur note (77% contre 54% en 2020)… Mais il souligne aussi que seules 2% des entreprises ont 100 points à l'index et que 77 entreprises ont une note inférieure à 75 depuis 4 ans… Certains chiffres sont édifiants : 1516 entreprises (6% des plus de 50 salariés) obtiennent un 0 pointé sur l’indicateur lié aux augmentations au retour des congé maternité, et 32% des entreprises ont moins de 2 femmes dans les 10 meilleures rémunérations… En France, « la French Tech, avenir de notre économie, est très en retard. Dans sa gouvernance, on note seulement 20% de femmes dans les conseils et encore moins dans l’équipe de direction. » regrette Sylvain Dhenin, Managing Partner d'Heidrick & Struggles. Pour redresser la barre, la Mission French Tech a lancé le Pacte Parité en mai 2022, 5 engagements concrets et simples pris par plusieurs centaines de start-up françaises pour le mouvement vers la parité.


Poursuivre les efforts en vue du changement


A l’international, l’UNICEF est en première ligne, surtout dans les pays déjà fragilisés : travail avec les secteurs nationaux de santé pour développer des soins de qualité pour les mères, lutte contre le mariage des enfants et les mutilations génitales féminines par la mise à disposition de « safe places », soutien à la prise en charge de la santé menstruelle ; aide à la mise en place de lieux d’apprentissages adaptés aux conditions de vie des filles pour renforcer leurs compétences. Aux quatre coins du monde, les projets visant à permettre l'accès à l'autonomie des femmes, notamment financière, se multiplient, souvent même à l’initiative des jeunes filles elles-mêmes. « Mon travail de plaidoyer porte sur la santé mentale et la santé et les droits sexuels et reproductifs. Mon expérience la plus enrichissante a été la formation de 98 jeunes du Zimbabwe au guide de plaidoyer de l'UNICEF pour la jeunesse, la plupart d'entre eux étant âgés de 16 à 24 ans. Le fait d'être formatrice m'a donné l'occasion de voir comment les jeunes sont prêts à lutter pour un changement positif dans leurs communautés » témoigne Tsungirirai Lucia Paridzira, une jeune zimbabwéenne.⁷ Actrices de leur émancipation, les femmes et les jeunes filles sont aussi épaulées par des programmes d'agences de développement. En France, l’AFD évalue désormais systématiquement ses projets à l’aune de leur impact sur les inégalités de genre. En 2014, le financement du métro à Kochi (Inde) l’illustre bien : trois quarts des employés du métro sont aujourd’hui des femmes, qui ont pu accéder au poste de conducteur de train ou de cheffe de station.⁸


Le combat contre les inégalités de genre ne pourra se gagner qu’avec les hommes. Et ils sont nombreux à avoir déjà rejoint les rangs. Le docteur Denis Mukwege, gynécologue congolais et prix Nobel de la paix 2018, prône ainsi une « masculinité positive », comprenant les droits des femmes comme des droits humains à part entière. Autre exemple : HeForShe, campagne de solidarité lancée par l’ONU Femmes pour promouvoir l’égalité des sexes et le droit des femmes en faisant participer les hommes et les garçons. Avec des campagnes comme #Faitpasgenre ou #JedisOui, l’organisation incite à se mobiliser et relayer des messages en faveur de l’égalité.




³Ibid

Inégalités femmes-hommes : les comprendre pour mieux les combattre (oxfamfrance.org)

Instances dirigeantes : la mixité progresse mais… (car il y a toujours un mais) - Cadremploi

⁷Girls and young women raise their voice for a more inclusive and equitable world | UNICEF Eastern and Southern Africa

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